La der’ des der’

« Pour la dernière fois ». 
Cette mini phrase, je me la prononce à moi même régulièrement en ce moment. 
Ma dernière grossesse. Mon dernier test de grossesse, ma dernière première écho, puis les autres. Mon dernier test du glucose (berk), mon dernier accouchement... tout cela ne m’arrivera plus jamais. Jusqu’à la fin de ma vie. 

Brutal non ? En vérité quand parfois j’en parle, j’entends des « oh ne dis pas ça, on ne peut jamais savoir, ne sois pas si catégorique ». Mes proches (très proches) ne prononcent pas cela. Mais les gens que je côtoie moins le pensent souvent. 
Pourtant, comme pour toutes les grandes décisions de ma vie, je suis catégorique. Je n’aurais plus d’enfant. J’inclue mon homme qui est bien raccord avec cette idée et on plaisante vasectomie et ligature pour la suite. 
Mais on en est sûrs, c’est terminé. Du coup, je profite de tout. Je vais aussi me lâcher un peu sur le shopping et les kiffs parce que « c’est la dernière fois ». 
Peut être que certains ne comprennent pas ou attendent que j’annonce dans quelques années « surprise, le petit troisième », mais ca n’arrivera pas. 
Je ne pense pas avoir à réexpliquer que, la grossesse et moi, ce n’est pas vraiment une histoire d’amour. J’adore être enceinte (c’est paradoxal) : sentir le bébé bouger, tout accepter pour cette vie qui pousse en moi, tout lui consacrer : temps, énergie...

Pour autant, ce n’est pas que du plaisir et les désagréments du début sont très impactants sur mon moral. On a coutume de dire que « ce n’est pas une maladie », je réponds « certes mais je ne suis pas moi-même non plus ! ». En temps normal, je déborde d’énergie, je suis assez téméraire et j’ai la bougeotte. Enceinte, je deviens ourse, peureuse, ralentie. 
Et puis surtout, ceux qui n’ont pas vécu le sentiment de peur de perdre son enfant « pour de vrai » ne peuvent pas comprendre mais c’est terrifiant. 
Pour Sam, on a bien bataillé. Cela nous a pris beaucoup de temps avant de ré-envisager une grossesse / un bébé. Et c’est vrai que cette histoire de trisomie au début de cette seconde grossesse n’a pas arrangé mon envie de recommencer un jour.
Je vais être mère pour la deuxième fois, j’aurais presque 37 ans, mon homme 39. Les enfants auront 7 ans d’écart. Financièrement, on souhaite aussi maintenir un certain « niveau » incluant des plaisirs (restos, sorties, voyages, petits achats) de temps en temps. Même si, début 2021, tout cela risque d’être mis entre parenthèses !

Alors je vis cette dernière expérience si intense qu’est la grossesse. Je lui consacre tout mon temps, toute mon énergie. J’ai hâte de vivre certaines choses (la rencontre, les premiers échanges qui sont si magiques). J’imagine tout cela avec légèreté, sans complications. Chose qu’il m’a été impossible d’envisager pour Sam, dont on savait qu’il partirait en neonat rapidement pour être opéré. Le fait de pouvoir porter cet enfant aussi, alors que Sam a dû en être privé quelques mois.

J’appréhende d’autres moments comme l’accouchement, l’allaitement (en direct cette fois ci), les soins de cordon que je n’ai pas pratiqué pour Sam évidemment. Ca fait beaucoup rire mes amis que j’ai peur de cela. 
Je sais pour les nuits, l’inquiétude, les microbes, les chutes, la fatigue, les hormones qui redescendent. Sans langue de bois, je sais que ce n’est pas « que du bonheur ». Mais ce sera « la dernière fois »... 

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